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Bonne lecture 🙂
Chronique du film-documentaire « Notre poison quotidien »
Réalisé par Marie-Monique Robin ; diffusé sur Arte le 15 mars 2011
Ce documentaire porte sur l’exposition des êtres humains à de multiples polluants, issus de leur environnement quotidien, et des effets sanitaires associés.
Quelques informations et points de vue intéressants, concernant la thématique « Santé des enfants et environnement »
Voici une liste d’informations et de points de vue issus du documentaire, en lien avec la thématique « Santé des enfants et environnement », et que je souhaite partager avec vous.
- De nombreuses substances toxiques se trouvent dans notre environnement quotidien, notamment dans des produits de consommation courante : produits alimentaires industriels, emballages et récipients en plastique, fruits et légumes issus de l’agriculture conventionnelle.
- Les agriculteurs et leur famille sont les premières victimes de l’utilisation des pesticides en agriculture.
- Certaines substances ajoutées aux aliments font l’objet de concentrations limites, censées garantir leur innocuité si elles sont respectées toute la vie : les doses journalières admissibles (DJA). Néanmoins, le calcul des DJA est associé à de fortes incertitudes ; en particulier, les valeurs des facteurs de sécurité utilisés font l’objet de débats.
- Pour les évaluations réglementaires des pesticides, les autorités se basent sur les données brutes produits par les fabricants. Ces données sont couvertes par le secret industriel et donc non publiques. Néanmoins, les autorités accompagnent leurs évaluation de résumés décrivant ces données.
- Les évaluations de risques de certaines substances présentes dans les produits alimentaires, comme l’aspartame ou le bisphénol A, font l’objet de controverses.
- Plusieurs membres de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA, en anglais European Food Safety Authority,EFSA) font l’objet de conflits d’intérêts.
- Les limites réglementaires sont établies substance par substance. Or le consommateur est simultanément exposé à de nombreuses substances. Les effets de ces mélanges, appelés les « effets cocktail« , sont peu connus ; certains mélanges peuvent générer des synergies de toxicité. Ces effets ne sont pas couverts par la réglementation actuelle. Ce constat est aussi à mettre en regard du nombre de substances mesurées dans le sang et les urines (plus de 200 aux Etats-Unis, dont le bisphenol A et de nombreux résidus de pesticides).
Quelques extraits en lien avec la thématique « Santé des enfants et environnement »
Savoir c’est pouvoir.
Au-delà des intoxications aiguës, jusqu’à une date récente, l’impact à long terme des pesticides sur leurs utilisateurs était un sujet tabou.
Sur les 100 000 produits chimiques commercialisés depuis la fin de la seconde guerre mondiale, seuls 900 ont été évalués par le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer) [dont] une trentaine de pesticides, ce qui n’est pas beaucoup si on compare avec le nombre de pesticides qui sont utilisés.
[Un représentant du CIRC] En fait c’est très difficile pour nous de faire une évaluation sérieuse des pesticides, parce que la majorité des études expérimentales qui les concernent ne sont pas publiques. Certes les firmes qui produisent des pesticides sont censées fournir des données aux agences sanitaires nationales, et elles font des tests, mais ces études […] ne sont publiées.
[Concernant les DJA], le facteur de sécurité, qui est censé être de 100, est un chiffre tombé du ciel et griffonné sur un coin de nappe.
La DJA a une dimension politique, car elle caractérise l’acceptabilité du risque. […] Acceptable… mais acceptable pour qui ?
Toutes les données concernant la toxicité des produits devraient être publiques. Seules celles liées aux procédés de fabrication devraient être couvertes par le secret industriel.
Un consommateur qui absorbe par exemple une petite quantité de colorants pendant deux semaines, pendant deux mois, pendant un an ou deux ans, peut n’avoir aucun effet nocif. Mais il faut prévoir que ces petites doses longtemps répétées, jour après jour pendant toute une vie, peuvent parfois comporter des risques extrêmement insidieux, et même parfois des risques irréversibles, car il y a certains colorants par exemple qui ont, au moins chez l’animal, été capables de créer de proliférations malignes, c’est-à-dire le cancer.
Il y avait une corrélation de 100 % entre les résultats des études et les origines de financement. Toutes les études financées par l’industrie concluaient que l’aspartame ne pose aucun problème. Et 100 % des études véritablement indépendantes concluaient qu’il y a avait un problème avec la substance. Malheureusement, l’argent est très puissant.
C’est un fait qu’il y a des études bien faites et des études lamentables. Et très souvent, les études qui sont financées par l’industrie sont conçues de telle manière qu’il est totalement impossible de détecter des effets nocifs. Cela veut dire que la littérature scientifique est régulièrement polluée par des études qui ne sont pas faites convenablement.
J’ai travaillé pour agence de réglementation pendant 25 ans. Si [les industriels] n’arrivent pas à te battre sur le terrain de la science, alors ils ont recours à des attaques personnelles. J’en ai fait moi-même l’expérience : ils ont voulu me faire virer de mon travail et la raison c’était, précisément, parce que je faisais mon travail. Malheureusement il est courant que l’on demande à des agents gouvernementaux de changer leur interprétation de données. Certains se plient, d’autres ne se plient pas. La plupart du temps c’est très difficile en raison de la situation économique de ces scientifiques.
Qu’est-ce qu’un perturbateur endocrinien ? La réponse est très simple : c’est une substance chimique qui interfère avec la fonction du système endocrinien. Que fait le système endocrinien ? Il permet de nous reproduire, il permet que nous fonctionnions normalement, il contrôle tout le processus de construction d’un bébé, depuis la fécondation jusqu’à la naissance : chaque muscle, la programmation du cerveau ou des organes, tout cela en dépend. Le problème, c’est que nous avons inventé des produits chimiques qui ressemblent aux hormones naturelles et qui peuvent se glisser dans les mêmes récepteurs, en allumant une fonction ou en l’éteignant.
Certaines agences de réglementation sont très lentes à s’adapter à la nouvelle science.
Fondamentalement, nous disons que le processus de calcul de la DJA est basé sur de fausses hypothèses, qui datent du XVIe siècle, qui ne prenaient pas en compte le fait que les produits chimiques puissent agir comme des hormones.
Mon avis
Les « + » :
- un gros travail de recherche et de documentation ;
- Intervention de personnes connues dans le domaine de la santé environnementale : François Veillerette, Ana Soto, Carlos Sonnenschein, Fred Vom Saal et… Theo Colborn (!).
- Intervention d’évaluatrices de risque de la FAO (de l’anglais Food and Agriculture Organization, soit en français Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) et du JECFA (Comité d’experts FAO/OMS sur les additifs alimentaires) qui permettent de clarifier certains aspects de l’approche réglementaire. Leurs discours raisonnables, selon moi, mettent aussi en perspective les thèses de l’auteure.
Les « – » :
- L’auteure met en difficulté certains interviewés, moins bien documentés qu’elle, qui ne semblent être que des gestionnaires administratifs de dossiers, pas les experts qui ont produit les évaluations de risques mises en cause.
- Il s’agit d’un « documentaire à charge », comme le mentionne la bande annonce diffusée sur Arte lors de la diffusion. D’une manière générale, cela ne me semble pas être la meilleure option pour apporter un éclairage sur une thématique et permettre au spectateur de pouvoir faire des choix éclairés. Dans le cas particulier de ce documentaire, il me semble que l’on peut observer une volonté de forcer le trait, de ne pas vouloir tenir compte de la complexité de certaines situations, de forcer des extrapolations et des conclusions à partir des faits, de vouloir absolument conclure au « scandale qu’on nous cache ». A mon sens, on passe ici du journalisme d’enquête au militantisme documenté.