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Bonne lecture 🙂
Chronique du livre « L’homme en voie de disparition ? »
de Theo Colborn, Dianne Dumanoski et John Peterson Myers ; 316 pages ; publié en 1996 (version anglaise)
Theo Colborn était une zoologiste et une épidémiologiste, dont les travaux ont contribué au concept de « perturbateur endocrinien ». Mondialement connue, professeur d’université et fondatrice de l’organisation non gouvernementale TDEX (Endocrine Disruption Exchange), Theo Colborn est souvent considérée, avec Rachel Carson, comme une icône du domaine de la santé environnementale.
Dianne Dumanoski est journaliste, spécialisée dans les questions d’environnement.
John Peterson Myers est biologiste et naturaliste.
Ce livre porte, d’une manière générale, sur certains types de substances chimiques, capables d’interférer avec le système hormonal, chez les animaux et chez les êtres humains. Cet article est la quatrième partie de la chronique ; la première se trouve ici : L’impact des pollutions environnementales sur les enfants, selon Theo Colborn (1/5)
Quelques informations et points de vue intéressants, concernant la thématique « Santé des enfants et environnement »
Voici une liste d’informations et de points de vue issus du livre, en lien avec la thématique « Santé des enfants et environnement », et que je souhaite partager avec vous.
- Le fait que de faibles doses puissent provoquer moins de dommages que de fortes doses est une observation bien documentée, mais dont les mécanismes restent imparfaitement compris. Ces mécanismes pourraient être liés aux capacités de rétroaction du système hormonal : à partir d’une certaine dose d’hormone, l’organisme réduit sa réponse. Ceci explique par exemple que le développement des différentes parties du corps s’arrêtent une fois ces parties sont adéquatement construites.
- À l’été 1991, Theo Colborn et Pete Myers réunissent 21 des principaux chercheurs qui étudient les substances interférant avec le système hormonal. À l’issue de cette réunion, la fameuse déclaration de Wingspread est publiée, informant et mettant en garde contre les effets des perturbateurs endocriniens sur les espèces animales et humaine.
- Pour les perturbateurs endocriniens, réaliser des évaluations des risques s’avère être un exercice très délicat, notamment car :
- les effets d’une exposition peuvent être décalés dans le temps, comme par exemple ne toucher que la deuxième ou troisième génération ;
- les effets peuvent être non-spécifiques, c’est-à-dire que d’autres facteurs environnementaux peuvent produire ou contribuer à produire les mêmes effets : diminution de la fertilité, troubles du comportement, affaiblissement des défenses immunitaires, difficultés d’apprentissage, obésité, hyperactivité…
- peu de données permettent d’évaluer les expositions, actuelles et historiques (en particulier au moment de la grossesse et des premières années de vie des enfants). Plus généralement, peu de statistiques concernent d’autres maladies que le cancer.
- la contamination par les produits chimiques est généralisée. Des produits de synthèse sont même mesurés dans le corps des Inuits. Dans ces conditions, il est devenu quasi-impossible de trouver un groupe de personnes constituant une référence, non contaminée, à partir de laquelle une comparaison pourrait être faite pour identifier des excès de risques liés aux polluants environnementaux, les perturbateurs endocriniens en particulier ;
- les expositions portent sur de multiples substances toxiques, dont les effets combinés sont difficilement évaluables. Dans ce contexte, vouloir établir des relations de cause à effet, spécifiques et indiscutables, est totalement illusoire ;
- soumettre des humains à des expériences de laboratoire, en particulier des femmes enceintes et des jeunes enfants, est bien évidemment contraire aux règles éthiques fondamentales. Par conséquent, demander une preuve « irréfutable » avant d’agir conduit à l’inaction, ce qu’ont bien compris les industriels dont les intérêts financiers sont en jeu. Les autorités en charge de la santé devront prendre des décisions sur la base d’informations imparfaites.
- Plus un homme est jeune, moins son sperme contient de spermatozoïdes et plus ceux-ci sont anormaux.
- La plupart des travaux de recherche porte sur différents types de cancers. Trop peu d’études portent sur les autres types de dangers auxquels l’humain est exposé.
- Au niveau individuel, les bonnes pratiques proposées par les auteurs comprennent :
- se laver régulièrement les mains. Faire de même avec les enfants, en particulier avec ceux qui s’assoient ou jouent souvent par terre ;
- bannir les pesticides de la maison. Des pesticides domestiques sont classiquement utilisés pour les plantes d’intérieur, le jardin, les animaux domestiques… En particulier, un insecticide n’est jamais sans danger. Plus généralement, toute substance destinée à tuer des êtres vivants, plantes ou animaux, peut probablement nuire aux hommes ;
- donner aux enfants des jouets sans peinture ni vernis, en bois ou en fibre naturelle. S’ils possèdent déjà des jouets en plastique, les empêcher de les mâcher.
Quelques extraits en lien avec la thématique « Santé des enfants et environnement »
Les perturbateurs hormonaux n’obéissant pas aux mêmes lois que les poisons classiques et les substances cancérogènes, les approches toxicologiques et épidémiologiques classiques ont apporté plus de confusion que de clarté. Ainsi, certains ont critiqué les réglementations officielles en affirmant que le corps peut tolérer de faibles doses de contaminants, car l’évolution lui a conféré des mécanismes de défense. Se référant au cancer, ils évoquent la faculté du corps à réparer l’ADN endommagé. Mais, d’après nos connaissances actuelles, l’organisme ne possède pas de mécanisme similaire pour compenser les effets des dérèglements hormonaux. En effet, les cellules sont programmées pour recevoir des messages hormonaux et acceptent des imposteurs chimiques qui imitent les hormones. La cellule réagit comme s’il s’agissait de l’hormone elle-même et ne considère pas leur action comme un dommage devant être réparé.
A cause du cancer, on a également l’habitude de penser en termes de maladie, ce qui ne facilite pas la prise de conscience des effets des perturbateurs hormonaux, qui peuvent affaiblir les individus sans les rendre malades. C’est pourquoi il est essentiel de rechercher chez les patients des signes de troubles fonctionnels en même temps que les symptômes classiques de maladie. Ainsi, avoir une mauvaise mémoire à court terme ou des difficultés d’attention n’est pas la même chose que souffrir d’une tumeur cérébrale. Dans le premier cas, il s’agit de déficits et non de maladies, mais ces déficits peuvent avoir des conséquences sérieuses pour la personne comme pour la société, car ils minent les aptitudes humaines et notre qualité de vie, et nuisent aux relations humaines, menaçant la stabilité sociale de notre civilisation.
L’idéal scientifique de la preuve irréfutable est plus approprié aux expériences de laboratoire qu’à l’étude du monde réel et à la protection de la santé publique. Une telle attitude a des points communs avec celle d’un médecin diagnostiquant une appendicite : en cas de doute, s’abstenir d’agir peut avoir des conséquences graves. De même que l’accumulation de faits et le bon sens ont permis de conclure que le tabac cause le cancer du poumon, il sera peut-être bientôt possible de conclure, à défaut de prouver, que les perturbateurs hormonaux sont en partie responsables de la diminution du nombre de spermatozoïdes, ainsi que de certaines incapacités d’apprentissage et de défauts d’attention chez l’enfant.
Le cancer est une maladie terrible aux effets désastreux pour les patients et leurs familles. En revanche, il menace peu la survie des populations animales et humaines. Si le cancer est une tragédie personnelle, il n’affecte guère les populations, où les individus disparus sont remplacés par d’autres. En revanche, les perturbateurs hormonaux sont présents partout et agissent de manière insidieuse, sabotant notre fertilité et notre développement. Ils peuvent donc menacer la survie d’une espèce entière, et, à long terme, peut-être la nôtre. […] En s’attaquant au développement de l’individu, ces substances sapent nos aptitudes ; en sabotant notre reproduction, elles minent la santé et le bonheur des personnes souffrant de stérilité et s’en prennent à des systèmes biologiques fragiles qui, pendant près de 4 milliards d’années, ont permis à la vie de recréer la vie, sans jamais s’interrompre.
Beaucoup d’entre nous renferment dans leurs tissus des concentrations de polluants suffisantes pour constituer un risque pour nos enfants.
Certaines études laissent penser que le transfert de contaminants pendant la gestation aurait un impact bien plus grand que pendant l’allaitement ; à ce moment, l’essentiel des effets possibles a peut-être déjà eu lieu.
L’habitude de se servir d’insecticides dans la maison et le jardin pour des raisons de commodité est dangereuse et irresponsable. Aux États-Unis comme en France, on répand plus de pesticides dans les jardins que sur les cultures, le plus souvent pour satisfaire notre obsession d’un jardin soigné, sans une seule « mauvaise herbe ». […] La plupart des insecticides et herbicides commerciaux n’ont jamais été testés pour leurs effets hormonaux.
De fortes doses ont parfois un effet moindre que de faibles doses. Est-ce caractéristique du système hormonal dans son ensemble ? Si oui, cela aura de profondes répercussions sur les tests de toxicité et sur la réglementation. Les industriels se plaignent souvent que les tests effectués avec de fortes doses surestiment les risques, mais c’est peut-être le contraire qui se produit : des fortes doses nous masquent certains effets.
Nous devons nous rendre à l’évidence : il n’y a aucun moyen de garantir l’innocuité des produits chimiques, y compris ceux que nous employons depuis des dizaines d’années. Les CFC étaient en usage depuis cinquante ans lorsqu’on a découvert le trou d’ozone. Le délai entre le rejet et les effets est très long, tandis que la complexité et la lenteur de réaction des systèmes naturels nous donnent un faux sentiment de sécurité, augmentant les risques de catastrophe.
Nous devons toujours nous rappeler que, malgré tous les progrès scientifiques, nous n’avons qu’une compréhension générale et imparfaite des grands systèmes naturels avec lesquels nous jouons, qu’il s’agisse du corps humain ou de l’atmosphère.
La suite de cette chronique se trouve ici : L’impact des pollutions environnementales sur les enfants, selon Theo Colborn (5/5)
Cette chronique met en avant l’importance de protéger les enfants des substances préoccupantes, car les effets potentiels pourraient être graves et pérennes. Ce blog a pour mission de vous aider et de vous accompagner dans votre démarche ! Pour vos premiers pas, vous pouvez vous appuyer sur le guide gratuit téléchargeable ci-dessous.
Photo par Gilles Péris y Saborit