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Bonne lecture 🙂
Bonjour à tous !
Cette série d’articles porte sur le lien entre l’environnement des enfants et leurs comportements alimentaires. Plus particulièrement, elle se base sur les travaux de Stephan Guyenet, spécialiste des neurosciences et de l’obésité Le premier article de la série a présenté les enjeux liés au surpoids et à l’obésité, en France et aux Etats-Unis.
D’une manière générale, nos comportements sont produits par notre cerveau. Les travaux de Stephan Guyenet se basent sur une affirmation simple : notre comportement alimentaire (appétit, préférences, rythme des prises, etc.) est un comportement particulier : pour comprendre la suralimentation, considérée ici comme un excès de calories ingérées par rapport aux calories utilisées par le corps, il faut donc porter attention au mode de fonctionnement du cerveau.
Voici les principaux systèmes cérébraux, conscients et non-conscients, qui influencent notre comportement alimentaire.
Système de la récompense
Le système de la récompense permet d’apprendre et de renforcer les comportements auxquels le cerveau attribue de la valeur. Façonné par des millions d’années d’évolution, le cerveau attribue beaucoup de valeur aux comportements qui favorisent la survie et la capacité à procréer. Concernant l’alimentation, ces comportements sont principalement ceux qui conduisent à l’obtention d’énergie (calories) car :
- au sein du corps humain, le cerveau, les défenses immunitaires et les organes liés la fertilité font partie des éléments les plus consommateurs d’énergie ;
- les environnements naturels sauvages sont pauvres en énergie disponible. Et cette énergie demande souvent un effort physique pour pouvoir être obtenue : chasser, cueillir, déterrer, préparer…
Lorsqu’un aliment riche en calories est ingéré, le système de la récompense enregistre toutes les caractéristiques liées à l’expérience, à partir des organes des sens externes (saveurs, parfums, vues, sons, lieu où on l’a obtenu, avec qui on était, ce qu’on a dû faire pour y avoir accès, etc.) et du tube digestif (texture, composition, etc.). Puis il nous invite à refaire l’expérience de ces aliments de valeur :
- en inscrivant en nous la façon de les retrouver. Le système de la récompense est une de nos sources d’apprentissage de comportements ;
- en augmentant notre motivation à les retrouver. Le système de la récompense renforce certains comportements, ponctuellement ou sur le long terme ; il choisit ceux pour lesquels il va créer une envie supplémentaire.
A chaque expérience de type, ce système envoie une incitation non-consciente du type « refais-le », avec un cran supplémentaire de motivation. Dans le contexte alimentaire, un fort niveau de motivation est couramment appelé « une envie », « une pulsion alimentaire », « une compulsion alimentaire »… Chaque personne ressent des envies spécifiques, plus prononcées pour certains aliments plutôt que d’autres, selon l’historique de ses propres expériences. Les comportements alimentaires correspondants peuvent être profondément ancrés dans le cerveau.
La principale hormone du système de la récompense est la dopamine.
Système de choix économique
Le système de choix économique compare les coûts et les bénéfices de différentes options d’actions, dans l’objectif de sélectionner le meilleur compromis, la meilleure « affaire ».
Ce système intègre des éléments conscients et des éléments non-conscients, soit les coûts et les bénéfices issus de toutes les parties du cerveau qui ont un rapport avec la prise de décision en cours : prédiction du futur impact sur la santé, coût financier, gain attendu de calories (grande influence dans la décision), facilité d’accès…
Système de la satiété
Le système de la satiété régule l’ingestion d’aliments sur le court terme, repas par repas. Il réduit notre envie de continuer à manger après que nous en avons eu assez. Le système de satiété intègre différents types de signaux issus du tube digestif, qui le renseignent sur le volume et le contenu des aliments ingérés.
Le système de satiété est d’abord conçu pour assurer que le corps obtient suffisamment d’énergie au cours d’un repas, sans excès. Le nombre de calories ingérées est donc un paramètre important. Un grand bol de laitue sans vinaigrette peut représenter un volume significatif, mais il ne sera pas vraiment rassasiant, dans le sens où l’envie de nourriture perdurera.
Au-delà des calories, d’autres caractéristiques de la prise alimentaire contribuent à l’atteinte de la satiété : il s’agit principalement de son volume, de son contenu en fibres et de son contenu en protéines.
Le système de satiété peut être influencé par d’autres systèmes. Par exemple, le système de la récompense a tendance à éteindre le ressenti de satiété pour les aliments à forte récompense : frites, pizza, glace, etc
La variété d’aliments disponibles au cours d’un repas augmente la prise alimentaire, car la lassitude (« habituation ») est atteinte par type de goût. De même, les mélanges ont tendance à augmenter la prise alimentaire, ainsi que la nouveauté des aliments, car elle attire l’attention : l’habituation est alors à son plus faible niveau.
Lipostat
Principalement localisé dans l’hypothalamus, le lipostat régule la masse graisseuse du corps sur le moyen-long terme. En première approche, son fonctionnement peut être comparé à celui d’un thermostat :
- le thermostat est réglé sur une valeur de consigne :
- si la température devient inférieure à la consigne, le thermostat enclenche le chauffage,
- si la température devient supérieure à la consigne, le thermostat enclenche la climatisation ;
- d’une façon similaire, le lipostat fonctionne avec une sorte de valeur de consigne, une quantité de masse graisseuse jugée optimale pour le bon fonctionnement du corps. Si la masse graisseuse présente est inférieure à cette consigne, alors certains processus vont se mettre en place, visant à obtenir plus d’énergie et à en dépenser moins. Par exemple, le lipostat influence le système de la récompense et le système de la satiété : selon l’écart avec la consigne, on est plus ou moins motivé à manger et on a plus ou moins de facilité à atteindre la satiété. Le phénomène inverse est également observé.
Le fonctionnement du lipostat et ses potentiels dérèglements seront développés dans le quatrième article de la série.
Systèmes de sommeil et de rythme circadien (basé sur l’alternance du jour et de la nuit)
D’une manière non-consciente, ces systèmes influencent le comportement alimentaire et la masse graisseuse, principalement en interagissant avec le système de la récompense, le système de choix économique et le lipostat.
Un sommeil insuffisant en quantité et en qualité :
- augmente la motivation vers les aliments riches en calories, ce qui conduit souvent à la suralimentation ;
- affecte le système de choix économique, en favorisant un « biais d’optimisme » – nous donnons plus de poids aux bénéfices à court terme, au regard des coûts futurs et des objectifs rationnellement fixés, comme manger sainement.
Chose intéressante, les activités cérébrales observées pendant un déficit chronique de sommeil sont proches de celles observées lors d’un épisode de déficit de nourriture.
Par ailleurs, quand nos habitudes d’alimentation et de sommeil ne sont pas alignés avec le cycle jour/nuit, ou avec nos horloges internes, nous avons tendance à prendre du poids.
Système de réponse à la menace
Ce système a pour fonction de préparer le corps à répondre à une menace. Les dangers que rencontraient nos ancêtres étaient probablement peu fréquentes, mais elles pouvaient menacer directement leur vie : animal sauvage, membre d’une tribu voisine, etc. Les réponses typiques étaient le combat ou la fuite. Dans le monde moderne occidental, les menaces perçues sont de natures différentes : elles sont généralement chroniques et de faibles intensités. Les réactions corporelles ressenties sont communément désignées par le terme « stress ».
Ces réactions comprennent une augmentation des niveaux de cortisol dans le corps, ce qui pourrait contribuer à perturber le fonctionnement du cerveau, et notamment élever la valeur de consigne du lipostat. C’est particulièrement le cas des situations stressantes qui paraissent hors de notre contrôle.
Le stress augmente aussi notre envie d’aliments de confort, souvent très denses en calories. Ces aliments atténuent l’activité du système de réponse à la menace, et donc l’inconfort associé.
La plupart des éléments de ces systèmes sont profondément ancrés dans notre cerveau, dans ses parties les plus primitives. Leur action est très efficace, car ils ont été sélectionnés et façonnés par des millions d’années d’évolution. Leur objectif était de maximiser les capacités à survivre et à procréer. Logiquement, ces systèmes devraient donc contribuer à une enfance et à une adolescence en bonne santé, en particulier au regard de potentielles maladies chroniques. Or aujourd’hui, ils peuvent contribuer à renforcer des comportements alimentaires qui nous rendent malades, nous et nos enfants. Pourquoi observe-t-on cette dérive dans le monde moderne ? C’est ce que nous approfondirons dans le prochain article : Comment protéger les enfants des environnements obésogènes, avec Stephan Guyenet (3/5)
Photos par Quinn Dombrowski et Tony Alter
Références :
- Guyenet S. The Hungry Brain: Outsmarting the Instincts That Make Us Overeat. Flatiron Books 2017.
- Site Internet Whole Health Source – http://wholehealthsource.blogspot.fr (Consulté le 27/04/2017).
2 Responses
Hello Guillaume
article très intéressant, j’attends avec impatience la suite …. merci beaucoup
Blanche
ok super, merci Blanche. Avec les we prolongés je vais pouvoir enchaîner sans trop tarder. A bientôt alors !
Guillaume