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Bonne lecture 🙂
Bonjour à tous,
Voici une nouvelle vidéo publiée sur la Chaîne YouTube Santé des enfants et environnement, intitulée “Interview de Denis Zmirou-Navier – À la recherche du savon magique”, ainsi que la transcription et le podcast associés.
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Présentation de Denis Zmirou-Navier, préfacier de À la recherche du savon magique
Bonjour les parents verts et prudents.
Aujourd’hui j’échange avec Denis Zmirou-Navier, notre préfacier pour A la recherche du savon magique. Il a notamment été directeur scientifique de l’Agence française de sécurité sanitaire environnementale (Afsse), qui est aujourd’hui intégré à l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), et président de la Commission spécialisée Risques liés à l’environnement du Haut Conseil de la santé publique. Il est aujourd’hui président de la cnDAspe, donc la Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé publique et d’environnement.
Côté librairie, il est l’auteur notamment de Toxique ? Santé et environnement : de l’alerte à la décision avec Francelyne Marano et Robert Barouki. Nous parlons notamment de la place des enfants en santé environnementale, de la place que peut occuper la santé environnementale dans l’éducation des enfants, et puis de ses conseils à l’attention des parents.
Et voilà, je vous amène Denis Zmirou-Navier.
Guillaume Santé des enfants et environnement. Denis, bienvenue sur santé des enfants et environnement.
Denis Zmirou-Navier. Bonjour
Guillaume Santé des enfants et environnement. Je suis très content de t’avoir avec moi aujourd’hui ; de pouvoir échanger avec toi. Déjà parce que tu es le préfacier d’A la recherche du savon magique. Parce que ça s’inscrit dans mon défi d’une vidéo par jour à l’occasion de la sortie du livre. Et puis surtout parce que, j’ai eu l’occasion de l’exprimer par ailleurs, j’ai beaucoup d’estime pour ton travail, pour ce que tu fais et pour la manière dont je t’ai vu le faire.
Denis Zmirou-Navier. Et bien, merci mon cher Guillaume.
Denis Zmirou-Navier, préfacier de À la recherche du savon magique : liens d’intérêts ?
Guillaume Santé des enfants et environnement. Avant de commencer, en lien avec les discussions qu’on peut avoir sur les liens d’intérêts et la cnDAspe, je voulais te poser la question que je souhaite qui devienne rituelle dans mes entretiens. Est-ce que tu as des intérêts que tu souhaites expliciter pour les spectateurs qui vont nous regarder et qui vont écouter notre échange ?
Denis Zmirou-Navier. J’ai des fonctions institutionnelles qui sont décrites. Mais j’ai passé toute ma carrière en tant que chercheur, dans le domaine des risques environnementaux. Et ça m’a amené à être un peu plus que chercheur, à plusieurs occasions. A être expert, voire même avocat, parce que j’ai par ailleurs présidé la société française de santé publique. Donc j’ai des liens d’intérêts énormes sur les sujets dont nous allons parler ! Mais je veux préciser que j’ai été amené, en tant que chercheur universitaire, à établir parfois des collaborations, y compris des cofinancements avec des entreprises. Toujours dans le cadre de co-financement public, jamais à titre individuel – c’est clair, c’était proscrit – des contrats signés par mon président d’université, par le directeur général de l’Inserm, etc. etc. Voilà donc mes liens d’intérêts, qui sont connus, déclarés, publics.
Place des enfants en santé environnementale
Guillaume Santé des enfants et environnement. Alors je te pose ma première question. Comme tu es quelqu’un qui a beaucoup de recul et d’expérience sur le sujet, ça m’intéressait de te poser une question assez générale pour commencer. Pour toi, quelle est la place des enfants dans le grand domaine de la santé environnementale ?
Denis Zmirou-Navier. C’est un énorme un sujet. Je pense qu’il faut qu’on considère que les enfants constituent une population vulnérable, à différents titres. Or une vision et une politique d’actions de santé publique ont vraiment comme principe général de protéger, d’abord, les groupes et les personnes plus vulnérables. Une raison d’ailleurs très forte pour cela, c’est qu’en déployant des actions de nature à protéger les populations vulnérables, au total, on protège à peu près tout le monde, le plus souvent.
Enfants et santé environnementale : vulnérabilités spécifiques
Denis Zmirou-Navier, préfacier de À la recherche du savon magique. Alors, pourquoi les enfants sont vulnérables ? En bien, évidemment, en raison de la constitution de leur corps, le développement de leurs cellules et de leurs tissus. Ce sont des périodes de développement qui sont toujours des périodes de plus grande fragilité aux effets de polluants, d’agresseurs environnementaux par exemple. Ayant en tête le cas de ces substances chimiques qui exercent une nocivité sur le développement de cellules du système nerveux. On appelle ça les neurotoxiques.
Par exemple, le plomb, le mercure ou bien, j’imagine que tous les parents qui vont nous écouter ont entendu ou lu un jour des choses à ce sujet, ce qu’on appelle les perturbateurs endocriniens. Les fameux PE, qui qui peuvent altérer la production d’hormones ou la lecture en quelque sorte que les cellules font des instructions que les hormones leur donnent. D’ailleurs, parmi les neurotoxiques, certaines substances chimiques agissent par un phénomène de perturbation endocrinienne. Alors, ça, c’est une première raison fragilité, du fait du développement.
Enfants et santé environnementale : expositions spécifiques
Denis Zmirou-Navier. Deuxième raison c’est que ces gosses, ils sont en règle générale beaucoup plus exposés que les adultes. Ils sont plus exposés parce qu’ils sont, si je puis dire, en ligne directe. Pour l’embryon dans le ventre de sa mère, mais également le tout petit qui met sans arrêt ses doigts à la bouche, avec des doigts qui ont les poussières déposées sur le sol [ou] des objets. Ou bien il peut même ramasser des fioles dont il ne connaît pas le contenant. Donc tout ça ce sont des facteurs.
Et puis, bon, ils n’arrêtent pas de bouger, ils nous crèvent. Ils respirent plus, ils mangent plus. A poids égal, ils ingèrent plus de choses : eau, aliments, air, et lorsqu’il y a des polluant dedans, chimiques ou microbiologiques, ils sont donc plus exposés. Voilà de bonnes questions pour lesquelles les enfants sont vraiment, je le pense et ce n’est pas exagéré de le dire, au cœur des préoccupations de santé environnementale. Parce qu’il faut toujours comprendre ces facteurs de vulnérabilité, il faut toujours savoir dimensionner les actions et les politiques de prévention à ces groupes plus vulnérables, fragiles, que sont notamment les enfants.
Guillaume Santé des enfants et environnement. Je suis très intéressé par ta réponse. Sur le côté à la fois « spécificités des expositions » et à la fois « sensibilité aux effets potentiels ». Mon analyse c’est qu’en effet cela demande un haut niveau de protection, qui doit être placé dans les politiques publiques. Et puis, en complément, et c’est la contribution que j’essaie d’apporter avec mon blog, c’est d’essayer d’en faire aussi une priorité dans l’action des parents, de donner un haut niveau de protection.
Champ de la santé environnementale
Guillaume Santé des enfants et environnement. Il me semble t’avoir entendu parler aussi à la fois de polluants et puis de stress environnementaux. Et je trouvais que c’était intéressant dans ta réponse, d’extrapoler, d’élargir. Parce qu’effectivement la littérature scientifique, on voit qu’elle pointe vers cette période de l’enfance comme très importante. Et avec une grande influence sur le reste de la vie. Et pas seulement sur des problématiques très classiques de santé environnementale, avec des polluants classiques comme ceux que tu as cité, un peu historiques. Mais également, on trouve d’autres stress environnementaux qui peuvent avoir des conséquences très importantes sur cette période. Et on peut vraiment élargir cette notion, y mettre des aspects relationnels. Typiquement cela a été remis en avant il n’y a pas longtemps, avec le rapport des 1000 premiers jours.
Denis Zmirou-Navier, préfacier de À la recherche du savon magique. Evidemment. Et puis prenons au combien une nuisance qui pèse sur la vie de tant de monde : le bruit. Un enfant va être perturbé par le bruit d’une manière beaucoup plus importante, avec des conséquences majeures par rapport à l’adulte sain. Comment dire, cela perturbe sa faculté d’attention, sa faculté de concentration. Ça le dissipe, et cela dit, combien d’enfants vont souffrir de bruit parce que leur logement est mal isolé, parce qu’ils vivent dans un espace où il y a du bruit dans leur apprentissage scolaire, et ceci dès le plus jeune âge. Donc ça a des conséquences énormes derrière. Et pourtant, mon Dieu, qu’est-ce qu’on en parle, qu’est-ce qu’on travaille sur les bruits.
Interview de Denis Zmirou-Navier – À la recherche du savon magique : Place de la santé environnementale dans l’éducation des enfants
Guillaume Santé des enfants et environnement. Je pose ma deuxième question. Après la place de l’enfant dans le grand domaine de la santé environnementale, ça m’intéressait, toujours avec ta position de recul, d’avoir ton avis sur comment la santé environnementale pourrait se placer dans la vie des enfants ; en particulier dans l’éducation qu’on leur donne. Et puis, plus généralement, ça m’intéresserait d’avoir ton regard sur comment les livres illustrés, tels que ceux sur lesquels on a travaillé. Comment ils peuvent contribuer
Denis Zmirou-Navier. Je pense que tout parent enseigne très tôt, vraiment dès le plus jeune âge, pour les enfants, à par exemple pas porter à la bouche tout ce qui se trouve à l’entour. Un peu plus tard, ne pas revenir dehors tout sale, sans se passer au robinet. Parce que le contact mains-bouche est vraiment quasiment le premier moyen d’exposition du tout petit. Et les poussières sur les doigts sont des poussières qui viennent de ce qu’on a ramené de l’extérieur. Elles viennent aussi de polluants qui sont dans la maison et donc qui véhiculent un certain nombre de d’éléments ayant des potentiels nocifs. C’est vraiment une voix importante d’exposition. Et qui peuvent contaminer ensuite les produits alimentaires, etc. Donc ça c’est ce sont des premiers conseils de base, que tout parent sait donner et doit savoir donner.
Parallèle avec les populations animales
Denis Zmirou-Navier, préfacier de À la recherche du savon magique. Maintenant, j’aimerais insister sur un point. Tout à l’heure, j’ai dit que protéger des personnes, et notamment des enfants, parce que plus vénérables, c’est souvent permettre de protéger à peu près tout le monde. Eh bien, je vais donner un parallèle avec une des populations vulnérables. Je ne parle plus tout à fait de personnes quand je parle de population générale. Ce sont les animaux. Non seulement les animaux de compagnie, mais les animaux dans la nature. Et là, il faut utiliser avec beaucoup d’intelligence, comment dire, cette tendresse naturelle, cette fascination qu’exercent les animaux sur les enfants.
Et donc, du coup, apprendre à nos enfants, non seulement à respecter les animaux, mais à faire ce qu’il faut pour les protéger. Pour les protéger contre les pollutions dans l’environnement, qu’on leur fait subir $ par les eaux usées maltraitées qui sont relâchées dans la nature. Par des pesticides qui sont trop souvent épandus de manière intensive. Par toute une série de pollutions liées aux activités industrielles.
Livres de santé environnementale
Denis Zmirou-Navier. Ces livres, et notamment ta série, remarquable sur ce plan-là, sont aussi au travers … et pas que les livres, les écrans, la télé, nos différents outils maintenant sur le web… sont des moyens par lesquels on peut toucher des enfants dans cette facette, après tout, un peu comme ces populations vulnérables. Dans la nature, dans la vraie vie, si l’on a en plus cette chance fabuleuse non seulement de les voir sur les écrans, mais aussi de les voir en vrai dans la forêt par exemple. Eh bien, on les protège. On doit les protéger.
On doit protéger l’environnement, parce que finalement, qui peut imaginer que l’air qu’on a pollué, que les eaux qu’on a polluées, que les sols dans lesquels on a laissé des déchets… finalement l’homme n’y est pas, et l’enfant en particulier, exposé ? Ça serait un peu long de décrire la manière dont ce contact finalement avec l’homme se fait. Mais sachez que, là, il y a des bibliothèques entières, scientifiques, documentant ces processus d’exposition de l’homme aux milieux pollués par nos activités humaines.
Logique One Health
Guillaume Santé des enfants et environnement. Je suis très content que tu aies inscrit ta réponse dans la logique générale « une seule santé », « one health », qui est notamment soutenu par l’OMS. Et qui est au cœur, vraiment, du quatrième plan national santé environnement. Et puis sur le lien avec les animaux, quand je t’écoutais, ça faisait écho chez moi, notamment à ta réponse précédente où tu parlais des perturbateurs endocriniens. Puisque parmi les premiers signaux qu’on a pu avoir, sur ce type d’effet, c’étaient des signaux sur animaux. Avec typiquement l’exemple symbolique des alligators de Floride. Et aussi, de mémoire, les poissons des Grands Lacs, ou les truites dans la Tamise…
Denis Zmirou-Navier. Absolument, ce sont des indicateurs, des bio indicateurs très importants. Quand l’animal est touché, l’Homme n’est pas loin.
Guillaume Santé des enfants et environnement. Et ça, ça fait penser à des messages de Rachel Carson. L’autre chose à laquelle je pensais quand je t’écoutais, c’était à un auteur que j’aime beaucoup. Il s’appelle Richard Louv. C’est un journaliste scientifique américain, qui a vraiment popularisé la notion de connexion avec la nature comme un besoin fondamental de l’enfant. Et notamment il mettait en avant le côté que, cette connexion, elle doit être aussi sur les aspects émotionnels. Ce n’est pas qu’un savoir livresque qu’on transmet, mais c’est aussi une connexion forte, de type émotionnel, que donc il serait bien de contribuer à créer chez nous. Et son dernier livre est spécifiquement sur les animaux.
Denis Zmirou-Navier, préfacier de À la recherche du savon magique : message pour les parents
Guillaume Santé des enfants et environnement. A la suite de ces questions assez génériques, je voulais savoir si tu avais un message important que tu voulais faire passer aux parents qui vont regarder cette vidéo.
Denis Zmirou-Navier, préfacier de À la recherche du savon magique. Oui, finalement. Il y a un message qui me semble important. C’est de savoir identifier des sources de confiance. Des sources d’informations de confiance.
J’ai pu évoquer dans cet entretien, ce qui est abondamment illustré dans les différents documents, aussi bien sur les vidéos que sur les livres, les bd que tu produis. Cela aide bien sûr les parents à adopter des comportements dans ce que, à plusieurs endroits, tu étiquettes comme leur zone d’action. Leur zone d’action personnelle en quelque sorte. Là où ils ont une marge d’initiative et même une responsabilité d’actions importantes.
Mais ne nous voilons pas la face, quand même. Il y a, du fait des comportements économiques, des comportements de personnes plus ou moins responsables, il y a beaucoup d’expositions à des facteurs environnementaux dont, même bien informés, même bien conscients des possibles risques et menaces, dont nous n’avons pas la maîtrise. L’air que nous respirons, la composition des aliments, ce qu’on achète… Mais on ne connaît pas toujours très très bien et de manière, je dirais, honnête la composition exacte. C’est pareil pour l’eau. Donc tous ces produits que l’on achète sur étagère, dans les magasins… est-on véritablement [xxx] de leur composition complète ?
Sources d’informations de confiance
Denis Zmirou-Navier. Donc c’est très important de de chercher à trouver des sources de confiance. Mais c’est compliqué. On ne peut pas le faire en tant que parent qui n’est pas un spécialiste de ces questions-là. Donc aller chercher non seulement des sources, mais des sources qui ont, comment dire, véritablement eu le souci de les rendre accessibles, synthétiques, assimilables par le plus grand nombre. Parce que c’est aussi une stratégie de lobbys. Soyons clairs. Parlons vrai. Qui prétendent apporter l’information mais qui n’apportent qu’une information très ponctuelle. En fait, qui détournent l’attention. Ou bien qui la rendent si compliqué, disant « ah mais moi je joue la transparence. Voilà. Après, débrouillez-vous ». Donc ils savent parfaitement que c’est une information stérile, inutile, et c’est conçu comme ça. C’est une sorte de fabrique de l’ignorance.
Donc j’insiste sur le fait que, il faut que chacun aille, sache, apprenne à aller consulter des sources pour lesquels il y a des règles. Pour lesquelles il y a une déontologie de l’information qui est délivrée, d’impartialité, d’accessibilité. Et non pas de fabriquer de l’angoisse. De fabriquer du, comment dire, de la bulle où les gens se replieraient, tellement ils sont paralysés par ces menaces continuelles. Donc ça, franchement, je vais vous dire, je suis pourtant…
Ouverture à la vérification : facteur de confiance
Denis Zmirou-Navier. Depuis longtemps, je travaille sur ces sujets là, mais il m’arrive continuellement être confronté à des sujets dont je ne suis pas familier. Et bien sincèrement, je suis beaucoup plus à l’aise quand je vais sur des sites publics, référencés et qui citent leurs sources, d’où ça vient. Parce que je peux aller vérifier. Et tout le monde peut aller vérifier. Si ce n’est l’individu tout seul. Mais en tout cas des associations qui se spécialisent sur ces sujets peuvent aller vérifier, contester. Et ça, c’est un facteur important de confiance. Et les ouvrages de « Monsieur Guillaume Karr », sont des ouvrages qui ont leurs sources (rires). Elles sont là et ce sont des sources sérieuses. Et ça donne confiance.
Guillaume Santé des enfants et environnement. Merci Denis (Rires). Je voulais rajouter deux compléments sur les éléments très importants de ta réponse. Sur l’aspect « fiabilité », en effet, je pense que c’était important qu’on n’entende que même des personnes aussi expertes que toi sont confrontées à ce même type de problématique. Quels types de sources elles privilégient par rapport à d’autres. Et puis je voulais aussi faire un complément sur l’aspect « le risque zéro parait inatteignable », même avec des parents très investis à leur niveau.
Agir à notre niveau de parents pour réduire les risques
Guillaume Santé des enfants et environnement. Le premier point que je voudrais souligner, c’est un écueil que je vois autour de moi. C’est que, souvent, des gens passent du « le risque zéro est impossible » à « il n’y a rien à faire ». Je voulais bien souligner que si, par notre action, on arrive à passer d’un risque d’un niveau – pour faire schématique – d’un niveau 1000 à un niveau 100 ou un niveau 10 : c’est déjà beaucoup. C’est déjà énorme. Et dans pas mal de situations, ça suffira à éviter l’apparition d’une maladie. Dans tous les cas, ça diminuera la probabilité d’apparition d’effets.
Un deuxième complément, c’était sur ce risque zéro inatteignable. Je pense qu’on a, une fois approfondi le comment diminuer l’exposition, on a aussi un deuxième volet sur lequel on peut jouer. On peut jouer un peu offensif comme j’aime bien dire – c’est ma fille en ce moment qui dit ça – on va faire que nous même, on peut contribuer à ce que les corps de nos enfants soient les plus robustes possible, avec un haut niveau de santé. Et pour un même niveau d’exposition, il y a des corps qui développent des pathologies et d’autres qui n’en développent pas. Et c’est encore un moyen sur lequel on peut agir pour diminuer les risques d’apparition de pathologies.
Au-delà du cercle familial
Denis Zmirou-Navier. Donc ça veut dire aussi que, bien informés, nos parents doivent, au-delà de cette zone d’action familiale, nucléaire, être aussi des acteurs responsables. Par exemple dans les associations, sur le plan civique. Parce que c’est aussi un moyen par lequel on va pouvoir faire pression sur les décideurs. Qu’ils soient les décideurs économiques, des décideurs politiques, administratifs… Donc il faut coupler les deux. Il faut être dans sa zone d’action personnelle, familiale ou amicale, et il faut être aussi dans sa zone de responsabilité, civique. C’est essentiel.
Guillaume Santé des enfants et environnement. Oui je te remercie d’avoir appuyé – c’est très important – sur cet appel à l’action citoyenne. Et aussi à la vigilance citoyenne. C’est un thème que je t’entends souvent employer, et notamment, avec ton apport en lien avec ta contribution à la cnDAspe. Je renvoie à la vidéo que j’ai faite par ailleurs.
Pour terminer, je te pose une question bonus. Est ce qu’il y a une maxime, un proverbe, qui caractérise bien ta vision de la santé environnementale, que tu te répètes souvent et que tu voudrais partager avec nous ?
Le droit de savoir
Denis Zmirou-Navier. Oui. Il y a une maxime d’un personnage que j’admire, que j’adore lire. Jean Rostand, biologiste, penseur, philosophe. « L’obligation d’endurer nous donne le droit de savoir. Et le fait de savoir nous offre la possibilité du changement. »
Je pense que c’est très profond parce que l’obligation de subir [xxx] on est des êtres humains dans une terre, dans un environnement qu’on ne façonne pas complètement. [Un environnement] dont on ne maîtrise pas totalement tous les doutes et menaces, tous les risques. Donc on est là, on est obligé de vivre dans un environnement même, si on peut un petit peu agir, avec notre marge d’action personnelle. Sachant cela, et ça renvoie à cet appel à l’engagement civique, sociétal, c’est le droit de savoir. Je dois exiger d’eux d’être informés sur la qualité des produits, sur la qualité de l’air, etc.
C’est parce que le fait de savoir, à ce moment-là, me donne cette grande liberté – plutôt de responsabilité – d’agir seul, lorsque je suis dans ma zone d’action, ou d’agir avec d’autres lorsque ce n’est pas tout à fait le cas. Et c’est souvent cette deuxième situation qui qui l’emporte. Donc cette obligation d’endurer me donne le droit de savoir. Et l’exigence de demander à savoir, de manière impartiale [xxx]. C’est ce qui me permet d’agir en tant que consommateur en tant que parent responsable.
Analyse bénéfices/risques
Guillaume Santé des enfants et environnement. Merci beaucoup pour le partage. Je connaissais la première partie la citation, mais pas la deuxième. Chez moi, cela fait écho à la balance bénéfices / risques. En particulier, c’est un critère assez classiquement utilisé dans la prise de décision. Les critiques mettent souvent en avant que, évidemment, il faut une balance bénéfices / risques positive. Et même très significativement positive. Mais aussi, que c’est important de s’interroger à la répartition qu’il y a derrière. Pour qui seront les bénéfices, pour qui seront les risques. [Et cela parait essentiel] d’expliciter ça auprès de ces personnes.
Denis Zmirou-Navier. Dans un langage qui soit accessible au plus grand nombre. Pas simplement pour quelques happy few qui sont des spécialistes du sujet.
Guillaume Santé des enfants et environnement. Oui et ça reboucle bien que la réponse précédente. Ok Denis.
Merci à Denis Zmirou-Navier, préfacier de À la recherche du savon magique
Guillaume Santé des enfants et environnement. Merci beaucoup pour le temps consacré, qui est déjà je crois bien au-dessus de ce qu’on avait prévu. Merci beaucoup pour la disponibilité, pour le contenu utile, pour les messages importants qui ont été passées. Pour ceux qui veulent suivre ton travail… Donc j’ai présenté la DAspe dans une vidéo précédente. Pour ceux qui veulent suivre ton travail, ce que tu fais, où est-ce qu’ils peuvent ce se rendre ? Où est-ce qu’on peut aller pour suivre ton travail. Je peux par exemple mettre le site de la DAspe.
Denis Zmirou-Navier. Oui, la commission déontologique sur les alertes de santé publique et d’environnement. Ils trouveront pas mal d’informations. Alors ce ne sont pas des informations telles que celles que tu offres aux parents, qui sont très très accessibles, [xxx] incarnés en quelque sorte. Là c’est plus de la réglementation. C’est un peu plus ardu, je dirais.
Moi, j’ai fini mon activité, je dirais, de chercheur et d’enseignant. J’ai été 35 ans enseignant. La passion d’une vie. Donc ce n’est plus sous cet angle-là, que les personnes pourront me suivre, en quelque sorte. Mais au travers de mes responsabilités actuelles, publiques, pour l’intérêt général.
Guillaume Santé des enfants et environnement. Merci beaucoup. Bonne continuation alors !
Références. Interview de Denis Zmirou-Navier – À la recherche du savon magique
- Ministère chargé de la Santé et Commission des 1000 premiers jours. « Les 1000 premiers jours. Là où tout commence », 2020. Notamment : lien. Et aussi :
- Louv, Richard. Our Wild Calling: How Connecting with Animals Can Transform Our Live sand Save Theirs. Algonquin Books, 2019. Et également :
- Colborn, Theo, Dianne Dumanoski, et John Peterson Myers. L’homme en voie de disparition. Terre Vivante, 1997.
- Carson, Rachel. Printemps silencieux. (Silent Spring : 1962): Wildproject Editions, 2014. Et aussi :
- Marano, Francelyne, Robert Barouki, et Denis Zmirou-Navier. Toxique ? – Santé et environnement : de l’alerte à la décision. Buchet-Chastel, 2015.