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Bonne lecture 🙂
Bonjour à tous,
Cet article porte sur le lien entre santé des enfants et topophilie.
A l’occasion d’un précédent article, nous avons vu ce qu’est la notion de topophilie : il s’agit d’une hypothèse, selon laquelle les êtres humains sont instinctivement attirés par l’environnement naturel dans lequel ils ont grandi. Un lien particulier nous y rattache. S’y retrouver nous procure un surplus de bien-être, qui peut se rapprocher du sentiment de « rentrer à la maison ». Cette hypothèse a été récemment reprise par Scott Sampson, dans son livre Comment élever un enfant sauvage [1].
Santé des enfants et topophilie : un lien particulier
Créer des liens est un phénomène courant dans le monde animal, car il représente un avantage pour la survie et la procréation. Par exemple :
- Le lien entre une mère et un jeune enfant favorise la survie de l’enfant : meilleur accès à la nourriture, protection contre les prédateurs, apprentissage des comportements essentiels, etc.
- Le lien entre un mâle et une femelle favorise… oui ça 😉 mais aussi la survie de l’enfant, pour les mêmes raisons que précédemment, un couple de parents étant plus efficace qu’une mère isolée.
La topophilie est une autre forme de lien, cette fois-ci entre un individu et un lieu. Tendance innée à créer des liens émotionnels avec le lieu où nous avons grandi, la topohilie génèrerait une curiosité instinctive envers l’environnement naturel local [2]. Cette curiosité permettrait notamment d’acquérir :
- une aptitude à mieux observer les différents éléments de l’écosystème local ;
- une connaissance approfondie de ses spécificités.
Topophilie : un héritage de nos ancêtres ?
Cette aptitude à l’observation et le savoir accumulé constitueraient alors un autre avantage pour la survie. Car afin de pouvoir se nourrir ou se défendre, nos ancêtres devaient connaitre par exemple :
- les animaux locaux – ceux pouvant être chassés et ceux pouvant constituer un danger – et leurs comportements ;
- les fruits et les légumes comestibles locaux ;
- les plantes médicinales locales ;
- les caractéristiques et les variations du climat local, afin par exemple de se protéger des épisodes extrêmes : chaud, froid, précipitations, etc.
- l’influence de ces variations climatiques sur l’apparition des espèces locales, animales et végétales. Par exemple : à quel mois tel tubercule peut être récolté ou tel oiseau migrateur arrive dans la zone.
Ce type de savoir est aujourd’hui désigné par l’acronyme « TEK », pour Traditional Ecological Knowledge, les connaissances écologiques traditionnelles.
Cet avantage pour la survie rend la topophilie cohérente avec la logique évolutionniste, dans laquelle s’inscrivent les analyses de ce blog.
Connexion précoce avec la nature de proximité
Si l’hypothèse de la topophilie est juste, alors quelles sont les implications concrètes pour l’accompagnement pratique de nos enfants ? Voici les éléments de réponses apportés par Scott Sampson :
- l’adaptation du cerveau à son environnement se fait pendant l’enfance. Une démarche de connexion avec la nature s’avèrera donc probablement plus efficace si elle débute dès le plus jeune âge. Sampson précise que la période idéale est la phase de développement émotionnel, c’est-à-dire entre un et six ans ;
- puisqu’ils ne pouvaient se déplacer sur de longues distances, le cerveau de nos ancêtres s’adaptait à un unique environnement local. L’exposition régulière d’un enfant à des éléments naturels très diversifiés – « du zoo municipal au parc national » – constitue donc probablement une stratégie peu efficace pour créer une authentique connexion avec la nature. Sampson suggère de privilégier l’exposition régulière à un seul et même type d’environnement local.
Ces deux implications sont cohérentes avec les recommandations de la Pyramide de Connexion avec la Nature, présentée à l’occasion d’un précédent article.
Santé des enfants et topophilie : répondre à un besoin essentiel
Sampson conclut ainsi son argumentation : « de même que les liens mère-enfant sont essentiels à la santé mentale de l’enfant (et de l’adulte qu’il deviendra un jour), le lien enfant-nature pourrait s’avérer critique pour un développement sain. […] la leçon clé ici est que le cerveau des enfants est littéralement façonné par l’expérience, si bien que nous ferions mieux d’être très attentif aux types d’expérience auxquelles nous exposons nos enfants. […] Notre corps, notre esprit et nos sens sont conçus pour se connecter à la nature. »
Pour conclure cet article sur le lien entre santé des enfants et topophilie, votre avis m’intéresserait ! Etes-vous convaincu qu’une topophilie s’inscrit en nous dès le plus jeune âge ? Et si oui, comptez-vous mettre en pratique les recommandations de Scott Sampson ? Partagez votre avis et vos retours d’expérience dans les commentaires !
Références – lien entre santé des enfants et topophilie
- Sampson SD. How to Raise a Wild Child. The Art and Science of Falling in Love with Nature. Houghton Mifflin Harcourt. 2015. Et aussi :
- Folmer A, et al. Wildlife and flora and the perceived attractiveness of green places. A comparison between local and national green places. Journal of Outdoor Recreation and Tourism. 2016 ; 16 : 16-23. Notamment : lien. Et également :
Photos notamment par La FoeZ et JonPauling
2 réponses
Je trouve intéressant que « Sampson suggère de privilégier l’exposition régulière à un seul et même type d’environnement local. » et que, selon lui, « L’exposition régulière d’un enfant à des éléments naturels très diversifiés – « du zoo municipal au parc national » – constitue probablement une stratégie peu efficace pour créer une authentique connexion avec la nature. »
J’ai grandi et vécu 20 ans dans la même région et, comme je l’expliquais en commentaire de ton premier article sur le sujet, je suis très attachée à celle-ci. Ainsi, je me suis souvent demandée ce que ressentaient les gens dont l’enfance a pu être une succession de lieux différents. J’avais toujours cru à vrai dire que les déplacements successifs dans des environnements différents ne pouvaient avoir que des avantages, étayant curiosité et débrouillardise, comme peuvent le faire les voyages. Je découvre que ce n’est (peut-être?) pas le cas. Aussi, je serais curieuse de savoir si Scott Sampson étaye cette affirmation par des arguments scientifiques? Ou si tu as connaissance d’autres sources traitant de cette problématique ?
J’ai refeuilleté ce passage du livre : pas de référence bibliographique particulière. Sampson est plus dans la proposition, en expliquant d’où il s’inspire. Il mentionne notamment E. O. Wilson, plusieurs fois cité dans ce blog, et un géographe : Yi-Fu Tuan.