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Comment empêcher les polluants d’endommager le cerveau des enfants, avec Barbara Demeneix (4/5)

[Concernant les perturbateurs endocriniens,] nous ne sommes plus seulement face à des ennemis qui détériorent l’ADN ou son système de réparation. Nous affrontons des produits insidieux qui brouillent le « langage du vivant » en mimant des hormones, supports de la communication et de la régulation, en déréglant le comportement même des gardiens que sont les cellules du système immunitaire. [Ce mode d’action souligne] l’échec des notions anciennes de seuil ou de dose [et] la sensibilité différentielle des populations (enfants, femmes enceintes, personnes immunodéprimées). - André Cicolella

Nous commençons tout de même à prendre conscience que l’enchaînement incroyablement précis de processus complexes et étroitement imbriqués est terriblement sensible aux interférences, et que d’éventuels obstacles peuvent avoir de graves conséquences. En cas de perturbation, le développement cérébral sera incomplet ou anormal sans qu’il y ait vraiment le temps ni la possibilité d’y remédier. - Philippe Grandjean

Chronique du livre « Le Cerveau endommagé »

Cerveau endommagé Barbara Demeneix enfants

De Barbara Demeneix, 411 pages, publié en 2016

 

Barbara Demeneix est biologiste. Elle dirige le laboratoire « Évolution des régulations endocriniennes » du Muséum d’histoire naturelle. Ses domaines de recherche incluent les hormones thyroïdiennes et les perturbateurs endocriniens. En 2014, Barbara Demeneix a reçu la Médaille de l’Innovation du CNRS.

Ce livre décrit certains effets sanitaires liés à l’exposition aux perturbateurs endocriniens : altération du comportement et diminution des facultés intellectuelles. Il propose des recommandations pour protéger les enfants, la population la plus touchée.

Ce livre fait l’objet d’une chronique en cinq parties. Cet article est la quatrième partie de la chronique. Elle porte notamment sur les mélanges de substances et l’action au niveau individuel. La première partie se trouve ici : Comment empêcher les polluants d’endommager le cerveau des enfants, avec Barbara Demeneix (1/5)

 

Quelques informations et points de vue intéressants, concernant la thématique « Santé des enfants et environnement »

Voici une liste d’informations et de points de vue issus du livre, en lien avec la thématique « Santé des enfants et environnement », et que je souhaite partager avec vous.

  • L’inventaire actuel du Toxic Substance Control Act (TSCA) de l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) répertorie plus de 84 000 substances chimiques, qui sont fabriquées ou importées au-delà de 10 tonnes. Cette liste n’inclue pas les substances couvertes par d’autres textes réglementaires : pesticides, additifs alimentaires, cosmétiques… Puisque, parmi elles, de nombreuses substances sont rejetées dans l’environnement, il est logique de retrouver plusieurs dizaines d’entre elles dans le corps humain.
  • Ce constat est d’autant plus préoccupant que des mélanges de substances de synthèse sont mesurées dans le liquide amniotique, le sang du cordon ombilical et le lait maternel. En d’autres termes, au moment où il est le plus vulnérable, l’être humain est entouré de « cocktails » de substances de synthèse, dont les potentiels effets synergiques sont peu connus. Cette situation n’a jamais eu de précédents dans l’histoire.
  • Les personnes nées dans les années 1940 et 1950 sont les premières à avoir été exposées à des doses significatives de composés chimiques, après leur naissance. Les enfants nés entre la fin des années 1950 et les années 1970 sont les premiers à avoir été exposés à des mélanges in utero. Ils ont fondé leur famille vingt ou trente ans plus tard, c’est-à-dire entre les années 1970 et 1990 ; leurs enfants sont donc :
    • issus de parents dont l’organisme a été exposé pendant la période prénatale et la petite enfance, puis tout au long de leur vie. Cet organisme est donc potentiellement altéré ;
    • sont exposés, pendant les mêmes période critiques, à des mélanges contenant plus de produits chimiques que leurs parents.
  • Pour certains types de substances, tels que les perturbateurs endocriniens, connaitre les effets des fortes doses ne permet pas d’extrapoler ou de déduire les effets des doses plus faibles. En particulier, de manière contre-intuitive, des doses plus faibles peuvent générer de plus grands effets sanitaires.
  • Les systèmes de santé actuels se basent sur des méthodes issues de la gestion des maladies infectieuses, telles que celles caractérisant la première moitié du XXe siècle. Ces méthodes doivent aujourd’hui être révisées : elles doivent s’adapter aux types de maladies chroniques qui ont émergé dans la seconde moitié du XXe siècle.
  • Concernant la santé neurobiologique, l’environnement joue un rôle clé. Dans ce contexte, la notion d’environnement doit être comprise au sens large, incluant l’eau, l’air, les aliments, les matières mises au contact de la peau (cosmétiques, produits de soin…) et même les interactions sociales.
  • Plus un événement néfaste se produit tôt, plus ses effets sont susceptibles d’être amplifiés au fil du développement de l’organisme : perturber un élément au début d’une série initie un véritable « effet domino », qui s’amplifie pendant les étapes suivantes. Cette logique est à la base de l’hypothèse des « origines développementales de la maladie adulte ».
  • Il est possible d’agir au quotidien, en tant qu’individus, de manière significative et utile. Les choix individuels, en particulier ceux portant sur le mode de vie, permettent de limiter l’exposition à aux substances chimiques de synthèse.
  • Plusieurs travaux de recherche montrent que la consommation des produits issus de l’agriculture biologique, comparée à celle de produits issus de l’agriculture conventionnelle, permet de réduire significativement l’exposition aux pesticides.
  • Les recommandations indiquées dans ce livre concernent, en priorité, les femmes enceintes et les jeunes enfants. Néanmoins, elles seront sources de nombreux bénéfices pour tous. Elles incluent les bonnes pratiques suivantes :
    • éviter les produits ménagers contenant des agents antibactériens ;
    • limiter l’utilisation d’agents imperméabilisants sous forme d’aérosol ;
    • préférer les poêles en fonte ou en acier aux poêles antiadhésives ;
    • limiter l’utilisation de crèmes solaires et de produits cosmétiques pendant la grossesse et l’allaitement. Cette recommandation porte tout particulièrement sur les produits contenant des parabènes et des phtalates.

 

Cerveau endommagé Barbara Demeneix enfants 4

 

Quelques extraits en lien avec la thématique « Santé des enfants et environnement »

Il n’existe probablement pas (ou peu) de causes communes ou d’associations « contaminant environnemental-gènes » responsables de l’ensemble des troubles neurodéveloppementaux évoqués. L’hypothèse qui suit s’avère beaucoup plus probable : chaque catégorie de maladie a de multiples causes génétiques et environnementales – qui s’accompagnent donc de facteurs combinatoires gènes-environnement aggravants. De la même manière, une seule cause – qu’elle soit génétique ou environnementale – peut être impliquée dans de multiples pathologies en fonction du contexte génétique et environnemental.

La génétique, les modifications diagnostiques et les pratiques de dépistage ne permettent pas d’expliquer la montée en flèche de l’incidence des troubles du développement.

Le vieil adage « mieux vaut prévenir que guérir » s’avère plus pertinent que jamais, car il n’existe aucun traitement. Il serait toutefois important de s’intéresser aux mesures thérapeutiques (limitées, mais potentiellement palliatives) consistant à inverser une partie des marqueurs épigénétiques affectant le comportement, la mémoire et les facultés intellectuelles.

À l’évidence, il est important de sensibiliser les femmes enceintes et allaitantes aux risques encourus de manière à ce qu’elles puissent prendre des précautions ; il est important aussi de former les médecins pour qu’ils puissent les aider en ce sens.

Le fait de s’assurer qu’aucune femme ne commence sa grossesse en souffrant d’une carence en iode (même légère) constitue une première mesure peu onéreuse, les avantages étant immensément supérieurs aux coûts. D’autres choix de mode de vie – modifier son alimentation, éviter l’alcool pendant la grossesse, réduire l’utilisation de certains produits de consommation – peuvent renforcer notre protection contre l’exposition à (et l’action de) certains polluants.

Dans le débat opposant le principe de précaution au fait d’attendre d’avoir les preuves des dégâts provoqués pour agir, de nombreux arguments ont été avancés en faveur de l’inaction. Outre l’argumentaire habituel – les industries concernées créent des emplois ; sans l’industrie chimique, notre monde retournerait à l’âge de pierre –, de nombreuses autorités et personnes doutent de la gravité de la situation : après tout, notre durée de vie n’a jamais été aussi longue. Elle augmente dans un grand nombre de pays (mais pas tous), apparemment en dépit de l’augmentation de la pollution. Dans ce contexte, certains pensent que la capacité d’adaptation des mécanismes physiologiques de l’espèce humaine (et de la biodiversité en général) permet d’affronter la charge chimique accrue.

Ces deux arguments – la longévité accrue et la capacité d’adaptation des mécanismes physiologiques – ne sont pas recevables dans le contexte de la perturbation endocrinienne. L’accroissement actuel de la durée de vie est basé – par définition – sur des données obtenues à partir de populations nées dans les années 1920 et au début des années 1930. Ces cohortes de naissances comptent parmi les premières à avoir bénéficié de l’amélioration des soins périnatals, de la réduction de la mortalité infantile précoce, de meilleures mesures d’hygiène, de meilleurs vaccins et de meilleurs antibiotiques. Ces facteurs ont réduit l’incidence des maladies infectieuses et la mortalité infantile qui lui était associée. Mais ces cohortes sont également nées juste avant l’arrivée de nouveaux produits chimiques, qui ont déferlé sur le monde par vagues successives : plastiques, DDT, essence au plomb, et une grande partie des substances mentionnées [dans le livre]. Les seniors en bonne santé que l’on voit aujourd’hui jouer au golf et danser en profitant de leur bonne santé n’ont jamais connu l’exposition in utero à laquelle ont été soumises les générations suivantes. En outre, de récentes données américaines font aujourd’hui état d’une baisse de la longévité.

Les niveaux de contaminants retrouvés dans la faune de l’Arctique et de l’Antarctique pourraient amener certains à penser que toute tentative de réduire l’exposition individuelle est perdue d’avance. Les faits montrent toutefois qu’une telle démarche en vaut la peine : de légères modifications du comportement peuvent avoir des effets significatifs sur certaines formes de charge chimique. On pense notamment […] au fait de préférer les aliments issus de l’agriculture biologique à leurs variantes classiques, ou de faire attention à la façon dont les aliments et les boissons sont emballés et préparés.

De nombreux styles de vie peuvent affecter les taux d’exposition de chacun. Les recommandations que fait le Royal College of Obstetricians and Gynecologists (RCOG) aux femmes enceintes et allaitantes constituent un bon point de départ pour cette discussion. Ce rapport souligne l’importance de bien choisir ses aliments, ses produits de soin et d’entretien, et ses médicaments sans ordonnance (phytothérapie comprise). Comme le dit le titre de son rapport de 2013, nombre des associations entre les produits chimiques et les effets affectant la santé infantile n’ont pas encore été prouvées, mais demeurent potentiellement dangereuses. De ce fait, l’application du principe de précaution n’est pas une mesure alarmiste, comme le prétendent certains, mais revient simplement à appliquer la règle que souhaiteraient respecter la plupart des mères ; une règle qui consiste à faire de son mieux pour permettre à son enfant d’entrer dans la vie de la meilleure manière possible.

 

La dernière partie de cette chronique se trouve ici : Comment empêcher les polluants d’endommager le cerveau des enfants, avec Barbara Demeneix (5/5)

 

Cette chronique met en avant l’importance de protéger les enfants des substances préoccupantes, car les effets potentiels pourraient être graves et pérennes. Ce blog a pour mission de vous aider et de vous accompagner dans votre démarche ! Pour vos premiers pas, vous pouvez vous appuyer sur le guide gratuit téléchargeable ci-dessous.

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6 réponses

  1. Hello Léa. Je suis assez d’accord, il me semble qu’il faut faire le deuil de l’ « exposition zéro ». La prévention n’en reste pas moins essentielle : diviser son exposition par 100 ou par 1000 produit des effets très bénéfiques, même si on n’atteint pas zéro. Pour le reste, l’exposition résiduelle, on peut mettre en place des bonnes pratiques qui diminuent ou neutralisent les effets des polluants, puis qui les font sortir plus vite du corps, voire qui permettent de réparer certains dommages. Tout un programme ! 🙂

  2. Il serait imprudent de réfuter en bloc le principe « la dose fait le poison » (plus il y en a, plus c’est toxique). Simplement, la relation entre dose et toxicité s’avère, dans certaines conditions, plus complexe. En fait, la dose n’est pas le seul critère important. D’autres facteurs, comme la vulnérabilité de l’organisme, sont essentiels : à titre d’exemple, un fœtus, un jeune enfant ou un adulte ne présentent pas la même sensibilité vis-à-vis des toxiques, les premières années correspondant à une « fenêtre de vulnérabilité » particulièrement critique.

  3. Comme autres sources de vulnérabilité, on pourrait aussi citer des associations avec certaines pathologies (par exemple celles touchant le foie, organe qui filtre/purifie le sang, notamment) ou certains régimes alimentaires. D’une certaine manière, la sensibilité aux polluants de l’environnement est inégalitaire ; il me semble que l’étude des différentes sensibilités est le seul moyen de protéger les plus vulnérables. Pour les fœtus et les jeunes enfants, effectivement, un plus grande vulnérabilité me semble aujourd’hui bien établie.

  4. C’est clair qu’avec nos régimes alimentaires actuels, il est difficile de protéger convenablement les plus jeunes. Et le régime alimentaire en est pour beaucoup; en tout cas pour moi. Car elle est la base de la majorité des maux que nous rencontrons aujourd’hui avec les plus petits; y compris également les adultes. Le fléau de l’obésité en est un bon exemple. Il touche presque toutes les catégories de population actuellement.

    1. On peut traduire la même idée en termes d’échanges de matière entre l’environnement et nous : les « briques » dont est fait notre corps proviennent principalement de la nourriture que nous mangeons

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